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Nom Bloch
Prénom Jules
Naissance Paris (France) (01 mai 1880)
Décès Sèvres (Hauts de Seine, France) (29 novembre 1953)
Sections
Sciences historiques et philologiques
Statuts et fonctions
Directeur d'études
Direction d'études
Grammaire comparée (novembre 1919 à septembre 1951)
Distinctions
Chevalier dans l'Ordre de la Légion d'honneur 
Prix Volney de l'Institut (1914)
Croix de guerre 1914-1918 
Origines familiales

Fils de Salomon Bloch, né à Cernay (Haut-Rhin), lui-même fils de Lazare Bloch, également né à Cernay, et de Caroline Bernheim née à Mulhouse, tous nés français. Les parents de J. Bloch sont juifs assimilés et laïcs, petits commerçants installés à Paris, rue Saint-Martin, quand naît l'enfant. 

Situation de famille

Marié à Yvonne Blum,quatre enfants: Alain (mort à 11 ans), Denis, Brigitte et Vincent, ce dernier aujourd'huir professeur émérite de neurobiologie à l'Université Paris XI, époux de Henriette Bloch, dir. d'études honoraire EPHE, SVT

Études et formations

D'une famille modeste, Jules Bloch accède comme boursier à l'enseignement du lycée. Pendant la préparation de l'agrégation de grammaire, qu'il obtient en 1905, il suit les conférences de Sylvain Lévi et d'Antoine Meillet à l'EPHE. Il suit les cours de hindoustani et de tamoul à l'École des langues orientales d'où il sort diplômé en 1905. 
Il est élève diplômé de l'EPHE section des Sciences historiques et philologiques en 1905 après avoir présenté un mémoire intitulé La phrase nominale en sanskrit (publié). De 1906 à 1908, il est pensionnaire de l'École Française d'Extrême-Orient et effectue des missions dans diverses régions de l'Inde (province de Madras, Bengale, Bénarès, Bombay et Poona) afin de collecter des données sur les langues indiennes, indo-aryennes mais aussi dravidiennes. Ce travail de terrain aboutit notamment au Doctorat ès-lettres (1914) : La formation de la langue marathe (thèse principale, publiée) et Un manuel du scribe cachemirien au XVIIe siècle (thèse complémentaire, publiée).

 

Parcours professionnel, responsabilité à l'EPHE

Jules Bloch se distingue par une remarquable longévité en tant que directeur d'études  à l'EPHE : il y est nommé le 1er novembre 1919 et y enseigne jusqu'au 30 septembre 1951. Il est cumulant lorsque, en 1937, il est nommé professeur au Collège de France. La direction d'études qu'il occupe est celle laissée vacante par le décès de Robert Gauthiot et conserve, tout au long, l'intitulé "Grammaire comparée". Les enseignements de J. Bloch portent, certes, sur les langues indo-européennes (notamment l'italique) et la grammaire comparée de l'indo-européen, mais aussi sur la grammaire comparée des langues indo-aryennes et sur des langues spécifiques de cette famille, du védique au marathe en passant par le sanskrit classique, le pali et les divers prakrits, épigraphiques (inscriptions d'Asoka) ou littéraires. A partir de 1929-1930, une certaine complémentarité s'instaure avec Louis Renou, directeur d'études pour le sanskrit.

Parcours professionnel hors EPHE

J. Bloch a enseigné, à des titres divers, dans presque tous les établissements d'enseignement supérieur parisiens donnant une place aux langues indiennes :
- Il assure la suppléance d'Alfred Foucher à la Sorbonne (1920-1926).
-  Professeur de langues modernes (de l'Inde) à l'École des Langues Orientales (1921-1937, puis professeur honoraire).
- Professeur au Collège de France (1937-1951) où il succède à Sylvain Lévi dans la chaire de langue et littérature sanscrites et où il avait assuré sa suppléance (1919-1920).

J. Bloch est Secrétaire adjoint de la Société de Linguistique de Paris (1920-1945).

Membre d'honneur de l'École Française d'Extrême-Orient (nommé le 21 juin 1939).
Membre honoraire de la Royal Asiatic Society (nommé le 17 février 1937).
Membre honoraire de l'American Oriental Society (1946).
Membre de l'Académie norvégienne (1947).

Autres activités

La musique fut l'une des principales activités non professionnelles de Jules Bloch, qui était un excellent pianiste.

Domaines de recherches

Formé à l'école d'Antoine Meillet à l'EPHE, qui se caractérise par la méthode, la rigueur et la clarté d'un style élégant et sobre, exempt de tout bavardage, Jules Bloch est un linguiste dont le champ d'étude couvre toutes les familles de langues indiennes : langues indo-aryennes dans leur diachronie, du sanskrit védique et classique aux langues modernes en passant par les langues moyen indo-aryennes dans leur ensemble (pali, prakrits épigraphiques et littéraires), mais aussi langues dravidiennes. Ses travaux ont des formats divers : notules sur un mot ou une particule, descriptions monographiques comme sa thèse de doctorat sur la formation de la langue marathe qui est un modèle du genre, ou grandes synthèses, l'une sur l'indo-aryen, l'autre sur les langues dravidiennes. Il n'y a pas dans sa recherche de "petites" langues. Celle des îles Andaman tout comme le tsigane font l'objet d'explorations pénétrantes. Les langues ne sont jamais considérées comme des abstractions. J. Bloch est aussi un linguiste de terrain, un sociolinguiste, préoccupé des usages que font des langues ceux qui les parlent et des peuples qui les utilisent et un historien. Sans nier l'importance du sanskrit, il veut en élargir l'étude et en faire la base d'une linguistique indienne. Le sanskrit "langue de classe", écrit-il, n'est pas destiné à exprimer l'ensemble de la civilisation indienne et son évolution s'explique aussi en fonction des autres langues avec lesquelles il est entré en contact, qu'il s'agisse des prakrits ou des langues vernaculaires. Ces dernières méritent donc des examens approfondis, tout comme leurs littératures.  Cette approche est tout à fait nouvelle. L'intérêt de J. Bloch pour le plurilinguisme de l'Inde, y compris de l'Inde ancienne, le conduit à mettre les inscriptions de l'empereur Asoka (IIIe s. av. n.è.) au cœur de sa recherche. L'introduction historique et linguistique précédant l'édition et la traduction de tous les édits connus à son époque  reste un ouvrage incontournable, en dépit des nombreuses  découvertes et avancées faites depuis sa publication (en 1950). Comme S. Lévi, son maître, J. Bloch a su attirer à Paris de nombreux savants étrangers de renom comme son ami le Suédois Helmer Smith, spécialiste de pali, et a contribué à former plusieurs jeunes linguistes indiens qui, marchant sur ses traces, ont produit des descriptions utiles de plusieurs langues indo-aryennes (ainsi Dhirendra Varma pour le braj).

Publications principales

Livres
- La phrase nominale en sanskrit, Mémoires de la Société de Linguistique de Paris t. XIV, 1906, p. 27-96.
- La formation de la langue marathe, Paris, 1919 (Bibl. de l'EPHE, Section des sciences historiques et philologiques n° 215). - Traduction en marathe publiée à Poona, 1941. - Traduction en anglais : The Formation of the Marathi Language, Delhi : Motilal Banarsidass, 1970.
- Un manuel du scribe cachemirien au XVIIe siècle. Le Lokaprakāça attribué à Kṣemendra, Paris : Geuthner, 1914.
- Sylvain Lévi et la linguistique indienne. Leçon inaugurale lue au Collège de France le 13 avril 1937. Paris : A. Maisonneuve, 1937.
- L'indo-aryen, du Véda aux temps modernes, Paris : Adrien Maisonneuve, 1934. - Traduction anglaise: Indo-Aryan. From the Vedas to Modern Times. English edition. Largely revised by the author and translated by Alfred Master, Paris : Adrien Maisonneuve, 1965.
- Structure grammaticale des langues dravidiennes, Paris : Adrien Maisonneuve,1946. - Traduction en anglais, Poona : Deccan College, 1954.
- Les inscriptions d'Asoka. Traduites et commentées, Paris, Les Belles-Lettres, 1950.
- Les Tsiganes, Paris : PUF, 1953, coll. Que sais-je ?
- Application de la cartographie à l'histoire de l'indo-aryen. Paris : Cahiers de la Société Asiatique (publié par C. Caillat et P. Meile), 1963.

Articles
Bibliographie complète et nombreux articles reproduits dans Recueil d'Articles de Jules Bloch 1906-1955. Textes rassemblés par Colette Caillat, Paris : Collège de France, Institut de Civilisation Indienne, 1985 (Publ. de l'Institut de Civilisation Indienne fasc. 52).

- "Sur quelques transcriptions de noms indiens dans le Périple de la mer Erythrée", Mélanges d'indianisme offerts par ses élèves à M. Sylvain Lévi, Paris : E. Leroux, 1911, p. 1-16.
- "La nasalité en indo-aryen", Cinquantenaire de l'Ecole des Hautes Etudes, Paris : Champion, 1921, p. 61-72.
- "L'intonation en penjabi. Une variante asiatique de la loi de Verner", Mélanges linguistiques offerts à M. J. Vendryes, Paris : Champion, 1925, p. 57-67.
- "Quelques désinences d'optatif en moyen-indien épigraphique et littéraire", Mémoires de la Société de Linguistique 23 (1927), p. 107-120.
- "Some problems of Indo-Aryan Philology". Forlong Lectures for 1929, Bull. of the School of Oriental Studies 5 (1930), p. 719-756.
- "Le présent du verbe être en tsigane", Indian Linguistics, t. 2., Lahore, 1932, Grierson Commemoration Volum, part I, p. 27-34.
- "Préfixes et suffixes en andaman", Bull. de la Société de Linguistique 65 (1949), p. 1-46.

 

Engagements

Homme de gauche, profondément laïque, universaliste et patriote, Jules Bloch appartient aux cercles intellectuels progressistes parmi lesquels il compte de nombreux amis de longue date (le linguiste Marcel Cohen, l'historien Lucien Febvre, Jean Richard Bloch, etc.). Il est l'ami de la revue littéraire de gauche Europe (où il a publié un article sur les inscriptions d'Asoka en 1924, 2e année n°21, p. 143-149) et n'hésite pas à apporter l'appui de son nom à de nombreuses manifestations. 
Jules Bloch est un pacifiste convaincu, ce qui ne l'empêche pas d'avoir assumé avec courage toutes les responsabilités militaires qui lui échurent durant la Première Guerre mondiale, où il se signale par sa bravoure comme sergent, sous-lieutenant, lieutenant d'infanterie, ce qui lui valut la Croix de guerre avec palme.D'abord révoqué du Collège de France, J. Bloch y est ensuite réintégré. Mais de 1941 à 1944, il est affecté  à une université de zone libre, d'abord Lyon, puis Toulouse. D'après une lettre de l'Administrateur du Collège de France du 2 novembre 1950, "M. J. Bloch n'a pas été atteint par les lois d'exceptions. Le gouvernement de Vichy l'a relevé de l'incapacité édictée par ses lois. Il ne l'a pas révoqué: il l'a seulement affecté provisoirement à la Faculté des Lettres de Lyon afin de le soustraire aux périls de la zone occupée".
En 1942, J. Bloch  échappe de peu à l'arrestation par la Gestapo à son domicile sévrien et passe à la clandestinité, se réfugiant dans la région de Castres. 

Volumes d'hommage

- Indian Linguistics 14 (1954). Jules Bloch Memorial Volume, Calcutta, 1954.
- Bulletin de la Société de Linguistique de Paris, fasc. 1, Paris, 1954. Dédié à la mémoire de J. Bloch.

Publications au sujet de la personne

- Armand Minard, "Jules Bloch (1880-1953)", Annuaire de l'EPHE, Section des sciences historiques et philologiques, 1954-55, Paris, 1954, p. 13-25. http://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0001_1954_num_1_1_4220

- Louis Renou, "Jules Bloch", Journal Asiatique 242 (1954), p. 411-414.

- Jean Filliozat, "Jules Bloch (1880-1953)", Bull. de l'Ecole Française d'Extrême-Orient 47, 2, 1955, p. 353-363.

- Paul Demiéville, "Jules Bloch (1880-1953)", T'oung Pao XLII, 5, 1954, p. 415-417.

- Marcel Cohen, "Jules Bloch", Europe 1954, 32, n° 98-99, p. 251-253.

- Eugénie Cotton, "Jules Bloch n'est plus", Trygée 1953, n°6, p. 41-42.

- Jean Filliozat, "L'œuvre indianiste de Jules Bloch", France Asie 1954, 10, 97, p. 696-697.

- Jean Filliozat, "Un grand indianiste : Jules Bloch", Le Monde du 9 décembre 1953.

Auteur de la notice
Nalini Balbir
Mise à jour
 le 11 septembre 2019 - 17:08