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Jean Bottéro
Jean Bottéro
Nom Bottéro
Prénom Jean
Naissance Vallauris, Alpes-Maritimes (France) (31 août 1914)
Décès Gif-sur-Yvette (France) (15 décembre 2007)
Sections
Sciences historiques et philologiques
Statuts et fonctions
Directeur d'études
Direction d'études
Assyriologie
Distinctions
Chevalier dans l'Ordre de la Légion d'honneur
Prix Roger Caillois
Origines familiales

Jean Bottéro est issu d'une famille très modeste ; son père était artisan. Dès son enfance, il a ressenti fortement la distance sociale, comme il l'a lui-même souvent raconté à ses amis et à ses étudiants.

Laboratoire
Équipe de Recherche Associée du CNRS "Pouvoir et société au Proche-Orient"
Études et formations

Jean Bottéro a fait ses études primaires en milieu catholique, dans la perspective d'une formation théologique et religieuse. Il apprend et intègre ainsi les fondements de la culture et des langues classiques, le latin et le grec, et de la philosophie antique et médiévale, s'intéressant aussi, comme il le rappelait, à la littérature, française et européenne. Entré au Petit Séminaire de Nice à 11 ans, il est par la suite accueilli chez  les Dominicains, et c'est dans cet ordre qu'il entre, après son baccalauréat. Dès 1932, il réside à l'abbaye de Saint-Maximin, en Provence. Les rencontres et l'amitié bâties dans ce contexte et ce milieu avec le P. Marie-Joseph Stève, qui étudie l'élamite, mais surtout avec le P. Lagrange, qui fonde en 1938 l’École Biblique de Jérusalem, réveillent, tôt dans sa période de formation, un intérêt précis pour le Proche-Orient ancien et les civilisations qui ont déterminé son histoire. Leur étude et leur connaissance lui apparaissent dès lors comme une des conditions pour interpréter les textes et les traditions bibliques. Il entreprend l'étude de l'hébreu, tout en approfondissant sa connaissance de la philosophie et des langues modernes. Si son projet d'un séjour à Jérusalem doit être abandonné en raison des vicissitudes de la guerre, en 1940 il obtient son doctorat, avec une thèse sur "Le problème de la rétribution individuelle dans la religion d'Israël, au travers de l'Ecclésiaste", sujet qui montre son orientation vers des problématiques historiques et religieuses.
A Saint-Maximin, il enseigne la philosophie grecque, l'hébreu et l’exégèse biblique. Toutefois, apparaissent progressivement des difficultés avec les autorités religieuses dominicaines en raison de sa conception du caractère historique des textes vétérotestamentaires et de ses interprétations considérées comme inacceptables. Cette situation critique l'éloigne de ses charges d'enseignement, jusqu'à sa sortie définitive de l'Ordre, qui aura lieu en 1950. Jean Bottéro a entre-temps commencé à suivre à l'EPHE les conférences de l'assyriologue René Labat (IVe Section). Il entreprend l'étude de l'akkadien et de l'écriture cunéiforme, se lançant dans la traduction en français du Code d'Hammourabi. Les compétences lui permettent alors d'établir rapidement son profil de philologue et d'épigraphiste, chargé de la publication de textes cunéiformes. Ce changement d'orientation scientifique, de spécialiste de la Bible à assyriologue, est marqué par l'obtention du Diplôme de l'EPHE, travaillant à l'édition de textes cunéiformes provenant du site syrien de Qatna, publiés dans la Revue d'Assyriologie. Il est intégré en 1947 au CNRS.

Parcours professionnel, responsabilité à l'EPHE

Revenant vers l'enseignement, donnant aussi des cours d'akkadien à l’École du Louvre, en 1953 Jean Bottéro commence à enseigner à l'EPHE, à la IVe Section, comme chargé de cours, grâce au soutien et à la confiance de René Labat, titulaire de la chaire d'Assyriologie. En 1958, une seconde chaire d'Assyriologie y est créée pour lui dans la même Section, poste qu'il occupera jusqu'au moment de sa retraite, en 1982.  Mais ses cours à l'EPHE, le lundi après-midi, se prolongeront jusqu'en 1990.
La publication régulière d'un résumé approfondi de ses conférences dans l'Annuaire de l’EPHE constitue une partie importante de ses œuvres, assurant, par leur grande diffusion et circulation sous des formes diverses, sa renommée et son autorité scientifique internationales.

Parcours professionnel hors EPHE

Reconnu pour ses qualités d'assyriologue et d'épigraphiste, Jean Bottéro est très tôt intégré à des équipes de recherche chargées de la publication et de l'étude des textes cunéiformes découverts lors de programmes archéologiques en cours. Dès 1949, il travaille, sous la direction de G. Dossin, sur les tablettes des archives royales de Mari, site syrien fouillé par la mission française dirigée par André Parrot, répondant à l'invitation de ce dernier à participer à ses recherches. Il visite la Syrie en 1952. Dans ce cadre, il publie, en 1954, avec A. Finet, le volume XV de la série ARM, Répertoire analytique des tomes I à V, et, comme auteur unique, le volume VII, Textes économiques et administratifs (1954-1957). Dès 1958, il est associé, comme épigraphiste, aux travaux de la mission allemande à Uruk, dirigée par H. Lenzen, et visite à trois reprises les chantiers en Irak.

Jean Bottéro a dirigé, entre 1977 et 1981, l'Équipe de Recherche Associée du CNRS "Pouvoir et société au Proche-Orient".

Domaines de recherches

Jean Bottéro a étudié la culture, la mentalité et la religion des sociétés du monde syro-mésopotamien ancien, travaillant surtout sur les traditions textuelles cunéiformes du deuxième et premier millénaires avant n. è. Ses travaux sont centrés sur l’édition de documents de découverte récente, fondée sur ses compétences épigraphiques et philologiques. Ils approfondissent la compréhension du sens et de la signification de textes littéraires, mythologiques, rituels et religieux qui illustrent l’évolution de la pensée et le fonctionnement politique des sociétés mésopotamiennes, déterminant les processus historiques. Jean Bottéro s'est toujours efforcé de faire reconnaître le sens, la valeur et l'éventuelle continuité de ces traditions aussi dans le contexte de la civilisation occidentale contemporaine et de notre propre système de pensée.
Pour cette raison, sa production scientifique, qui met en lumière une progression, une évolution historique de la culture humaine – identifiée dans une de ses phases les plus anciennes, documentée par l'écriture –, a connu un vif succès et une diffusion bien au-delà du cercle des confrères assyriologues. Elle s'est élargie vers une audience autre, celle des historiens de l'Antiquité, mais aussi des anthropologues, des philosophes, des historiens des religions, des littératures et des sciences, provoquant et stimulant un débat commun.
Loin d'avoir un simple penchant pour la vulgarisation, Jean Bottéro donne à tout son travail de philologue et d'historien une impulsion fortement centrifuge par rapport à la discipline assyriologique, pensant et communiquant ses connaissances en référence à d'autres savoirs, convaincu de la nature compréhensible et comparable des formes et des contenus de la culture qu'il découvre, tant dans les documents administratifs que dans la littérature mythologique, religieuse et épique, ou encore dans les textes culinaires.
De ses premières expériences, quand il s'intéressait aux matériaux mésopotamiens les reconnaissant comme l'arrière-plan nécessaire pour comprendre le développement des traditions bibliques, il a retenu la fonction essentielle de ce type de comparatisme, qui permet une herméneutique nouvelle, libérant, par la confrontation et l'opposition, des significations, autrement  cachées et invisibles dans le document. C'est dans cet esprit qu'il a réalisé un investissement important dans la traduction, érudite mais de grande qualité littéraire, des textes mésopotamiens, afin de les mettre à la disposition de la recherche en sciences humaines. Si les problématiques religieuses ont occupé une grande place dans ses travaux, les études de J. Bottéro sur les modes de pensée mésopotamiens, révélés par l'introduction de l'écriture et par la logique de la divination, générant une forme spécifique de rationalité, ont marqué une étape importante pour la reconnaissance de certaines des caractéristiques et de la valeur historique cette culture antique.

Publications principales

La religion babylonienne, Paris : PUF, 1952.
Avec A. Finet, Répertoire analytique des Tomes I à V, Archives Royales de Mari XV, Paris : Imprimerie Nationale,1954
Textes économiques et administratifs, Archives Royale de Mari VII, Paris : Imprimerie Nationale, 1954-1957
Mythes et rites de Babylone, Paris, Bibliothèque de l’EPHE, IVe Section, Sciences Historiques et Philologiques, tome 328e, 1985.
Naissance de Dieu. La Bible et l'historien, Paris : Gallimard, 1986.
Mésopotamie. L'écriture, la raison et les dieux, Paris : Gallimard,1987.
Avec S. N. Kramer, Lorsque les dieux faisaient l'homme. Mythologie mésopotamienne, Paris : Gallimard, 1989.
L'épopée de Gilgamesh. Le grand homme qui ne voulait pas mourir, Paris : Gallimard, 1992.
Initiation à l'Orient Ancien. De Sumer à la Bible, Paris : Seuil, 1992.
Avec M.-J. Stève, Il était une fois la Mésopotamie, Paris : Gallimard, 1993, 2009.
Babylone. A l'aube de notre culture, Paris : Gallimard 1994, 2008.
Babylone et la Bible, Entretiens avec Hélène Monsacré, Paris : Les Belles Lettres, 1994; Paris, Hachette, 1994; 1999
Textes culinaires mésopotamiens/Mesopotamian Culinary Texts, Civilizations 6, Winona Lake, Indiana, Eisenbrauns, 1995
La plus vieille religion. En Mésopotamie, Paris : Gallimard,1998.
La plus vieille cuisine du monde, Paris : Audibert, 2002; Paris, Seuil 2006
Au commencement étaient les dieux, Paris : Tallandier, 2004; Paris : Hachette, 2008

"Les inventaires de Qatna", Revue d'Assyriologie 43 (1949), p.1-40. 135-215; 44 (1950), p.105-118. 119-122
"L'Ecclésiaste et le problème du Mal", La Nouvelle Clio, Bruxelles, 1956, p.133-159
"Lettres de Mukannishum", dans ARM vol. XIII, Textes Divers, Paris, Geuthner, 1964, p.15-43. 157-163
"La Femme dans l'Asie occidentale ancienne: Mésopotamie et Israël", dans Histoire Mondiale de la Femme, vol. I, Préhistoire et antiquité, P. Grimal éd., Paris 1965, p.155-247
"Das Erste Semitischen Grossreich", dans Tome II, Vom Paläolithikum bis zur Mitte des 2. Jahrtausend, de Fischer Weltgeschichte, Tomes II-IV dirigés par E. Cassin, J. Bottéro et J. Vercouter, Frankfurt am Main, 1965-(1994, 2003)
"Syria and Palestine, c. 2160-1780 BC. Relations with Mesopotamia", The Cambridge Ancient History, Vol I, Cambridge University Press 1965, p. 30-37
"Le pouvoir royal et ses limitations d'après les textes divinatoires", dans La voix de l'opposition en Mésopotamie. Bruxelles, Institut des Hautes Études de Belgique, 1973, p. 119-165
"Symptômes, signes, écritures en Mésopotamie ancienne", dans J.-P. Vernant et alii, Divination et rationalité, Paris, Seuil, p. 70-197
"Les noms de Marduk, l'écriture et la "logique" en Mésopotamie ancienne", dans M. de Jong Ellis éd., Essays on the Ancient Near East in Memory of J.J. Finkelstein, Hamden Connecticut, p. 5-28
"La mythologie de la mort en Mésopotamie ancienne", dans Death in Mesopotamia, XXVI RAI, Copenhague 1980, p.25-52

Volumes d'hommage

Sous la direction de X. Faivre, B. Lion et Cécile Michel, Et il y eut un esprit dans l'Homme. Jean Bottéro et la Mésopotamie, Paris, De Boccard 2009, 346 p.

Travaux 6, Maison René Ginouvés, Archéologie et Ethnologie.

En 2004, un colloque en son honneur a eu lieu à l'Université de Québec à Montréal.

Auteur de la notice
Maria Grazia Masetti-Rouault
Mise à jour
 le 30 septembre 2018 - 09:34